Octobre : Prise de recul – Peines – Partie 1
Si tu as lu le dernier article, tu te dis peut-être que la vie est belle quand on est expatrié et loin de ses proches. Je souhaite, par ce nouvel article, te montrer le revers de la médaille de cette nouvelle vie que j’ai décidé d’entamer il y a bientôt 4 ans.
L’idée n’est pas de se plaindre de quoique ce soit car je pense au fond de moi que la décision prise il y a 4 ans était la bonne. L’idée serait plutôt de montrer qu’il y a certains aspects sur lesquels j’aurais pu être mieux préparé. Étrangement, je constate que j’ai quand même plus de contenu que ce que je pensais initialement. Il y aura donc une deuxième partie pour les joies et pour les peines #teasing
Expatriation
D’après la définition officielle, l’expatriation est le fait de « Quitter volontairement sa patrie, partir en exil« . Alors je te rassure tout de suite, je ne suis pas en exil. J’ai donc quitté ma « patrie » pour en explorer d’autres, sans savoir si j’allais vivre longtemps au Canada. C’est certain, sur le papier, c’est une aventure alléchante, que beaucoup souhaiteraient vivre. Cependant il faut savoir que lorsque l’on est loin de sa « patrie », on est loin de « chez soi ». Cela est aussi valable quand on trouve un environnement francophone dans lequel évoluer.
Au départ, j’ai considéré être en « vacances ». En effet, je voyageais avec mon sac à dos, durant 4 mois, je m’attachais surtout à profiter de chaque instant.
Une fois cette partie divertissante passée, j’ai dû trouver un travail. C’est à ce moment-là que j’ai senti les premiers effets d’une décision prise plusieurs mois auparavant. N’ayant quasi personne sur qui compter dans ce vaste pays, je n’ai pu compter que sur moi-même pour trouver un emploi au Canada. Finalement, tu devrais connaître l’histoire (sinon c’est par ici) et j’ai donc utiliser la seule carte que j’avais en ma possession à ce moment-là : la carte Jordane. Ce seul et unique contact qui m’avait été donné quelques semaines avant de quitter la France.
Si je te raconte ça, c’est pour te dire que, dans un projet d’expatriation, tu te retrouves, la plupart du temps, seul face à tes choix et leurs conséquences. Comme si le côté « volontaire » de la chose te revenait en pleine face. C’est donc un des aspects dont j’ai eu la « chance » ou l’occasion de découvrir assez rapidement dans mon projet ici.
Distance avec la famille
C’est certainement le principal point de ce type de projet de vie. Quand tu t’expatries et que tu pars avec un gros sac à dos sur le dos, tu ne peux pas emmener tes proches avec toi. Parfois c’est bénéfique et ça te force à être autonome *1000, parfois c’est difficile à vivre. Beaucoup de jeunes expatriés (ex : à Montréal) rentrent en France après 1an ou deux à cause de ce manque.
Je te mentirais si je te disais que je n’y ai jamais pensé. C’est difficile de revoir sa famille maximum deux fois par an, c’est une réalité. Il me paraît évident qu’avec les technologies actuelles, nous pouvons rester en contact étroit malgré la distance. C’est certainement un facteur différenciant dans les différents projets d’expatriation par rapport aux générations précédentes. Nous sommes capables d’avoir une vie plus « nomade » sans forcément couper les ponts avec nos proches. Tout comme le travail d’ailleurs…
La distance avec la famille est un point important à prendre en compte dans ce type de projet de vie. J’avoue l’avoir pris un peu à la légère en préparant mon départ. Lorsque mon frère a eu son petit et que j’ai commencé à voir recevoir des photos, le poids de ma décision s’est soudainement fait sentir. J’ai ainsi ressenti un besoin plus fort de rentrer pour partager ces moments avec mes proches.
Moments difficiles
La gestion des baisses de moral est très différente lorsque tu es loin de tes proches. La construction de nouveaux repères prend plus ou moins de temps en fonction des personnes. Pour ma part, cela passe par une situation professionnelle stable, un logement accueillant et une vie personnelle équilibrée. Je pense que, dans mon cas, cela aura pris environ 3 ans pour que je ressente les effets d’une stabilisation dans cette nouvelle vie.
Il n’empêche que les moments difficiles sont toujours des instants de doutes ou tu te poses quelques questions comme : « Ai-je fait le bon choix ? », « suis-je à ma place ? », « vais-je rater des moments clés avec mes proches ? ».
Dans ce genre de moment, il faut se rappeler pourquoi on a pris ce tournant dans notre vie et ce qui a motivé le choix initial. C’est facile à faire dans les premiers temps. J’imagine que les personnes qui décident de rentrer en France au bout de 10 ans d’expatriation n’arrivent plus à se souvenir de leur(s) motivation(s) initiale(s). Ces personnes ont peut-être l’impression d’avoir fait le « tour » de l’expatriation et qu’il est temps de rentrer au « bercail ».
Immigré
Au Québec, on a tendance à te rappeler régulièrement que tu es un immigré ou juste « français ». Dans la façon de s’exprimer, sociabiliser, travailler, on reste différents. De mon point de vue, c’est plutôt une richesse pour le Québec et plus largement le Canada. L’immigration apporte une variété d’expérience et une pluralité de vision qui peuvent améliorer beaucoup de choses.
Le point de vue des personnes originaires du Québec est un peu différent. Ils pensent que l’immigration est plutôt un danger pour la protection de leurs valeurs et de la langue française. Ils en viennent même à dire que l’immigration fait augmenter le chômage alors que, au contraire, cela permet de combler des postes que les québécois ne sont pas en mesure de prendre. Ceci s’explique par une différence d’expertise et/ou de formation.
Néanmoins, je pense que c’est une réaction plutôt naturelle. On connait un peu le même rapport à l’immigration en France. C’est également un aspect à prendre en compte quand tu arrives dans un pays d’accueil.
Démarches
En rapport avec la vision de l’immigration, les démarches (spécialement au Québec) et surtout leurs délais respectifs sont la principale frustration d’une expatriation au Québec. Les choses évoluent, heureusement, avec la possibilité de déposer son dossier en ligne mais les délais sont globalement plus longs au Québec qu’ailleurs au Canada.
Cela est difficilement explicable autrement que par le fait d’une « volonté » politique de « décourager » les immigrants dans leur projet. En tant que demandeurs dans ces démarches, nous vivons globalement cela comme une des difficultés principales. D’une part, nous devons être irréprochables dans notre vie et assurer un suivi de nos démarches pour conserver une liberté relative. D’autre part, le manque de suivi de nos demandes d’immigration ne nous montre pas réellement une intention d’être accueilli « à bras ouvert » comme le répète le Canada.
Santé
Ce qui m’inquiète le plus en ce moment et cela depuis la pandémie de Covid est la robustesse du réseau de santé au Québec.
Cela a mis en lumière d’énormes manques dans le système actuel. Non pas par un manque de prise en charge mais plutôt par un manque de moyen dans les milieux de soins. On a vu ce que cela a donné pour les résidences pour aînés… Ce n’est pas forcément cela qui me préoccupe le plus (on verra plus tard) mais plutôt le manque de personnel dans tous les secteurs de soins. Pour prendre un exemple concret, il faut attendre entre 2 et 3 années avant d’avoir un médecin traitant (« médecin de famille » ici). Récemment, je cherchais à avoir une prescription pour effectuer une prise de sang. Je ne sais même pas comment m’y prendre pour éviter de me présenter dans une clinique et de devoir y passer plusieurs heures pour demander cela.
Il est difficile d’avoir un suivi ou même d’avoir une prescription quelconque. Il est relativement plus facile d’aller aux urgences quand quelque chose de plus grave arrive par manque de suivi plutôt que de faire de la prévention. Je trouve cela dommage car cela permettrait sans doute de désengorger les urgences en assurant un suivi plus serré des personnes.
D’ailleurs, lorsque tu suis des démarches d’immigration pour rester au Canada, tu dois passer une visite médicale. Au cours de cette visite, on te fait une prise de sang et une radio des poumons. Après cela, tu passes devant un « médecin » qui te demande si tu as des problèmes de santé. La consultation dure quelques minutes et tu peux repartir. J’ai trouvé assez léger comme examen. Bien sûr, je suis conscient qu’on ne peut pas étudier en détails tous les prétendants à l’immigration. Je pense néanmoins qu’un peu plus de prévention permettrait d’éviter d’encombrer les urgences.
Sur une autre note
Je ne peux pas écrire un article au mois d’octobre sans te parler de ce qu’il s’est passé pour moi durant cette période.
En résumé, j’ai eu la chance de pouvoir passer deux semaines en France auprès de mes proches. Cela m’a permis, une nouvelle fois, de me prouver que le travail depuis la France est une tâche délicate. Parti plein d’espoir, notamment en pensant que je pourrai allier le temps passé avec la famille et mon travail, je suis rentré déçu de voir que j’avais fait un trou dans ma facturation pendant ces deux semaines. D’un autre côté, j’ai pu profiter pleinement de ce temps passé avec ma famille et voir à quel point mon cher neveu avait grandi.
J’ai été plutôt surpris de l’impact de la situation économique pour mes proches avec son lot d’inquiétudes pour la suite. Je me suis rendu compte que la vie au Canada nous permet d’être « protégés » des enjeux majeurs de la crise économique actuelle. Cela même si nous ressentons les conséquences au quotidien. Je pense que l’impact est moins fort au Canada qu’en France grâce à la richesse énergétique de mon pays d’accueil même si, tu l’auras compris, tout n’est pas toujours rose.
En rentrant chez moi (à Montréal), j’ai été accueilli par mes amis lors d’activités diverses. D’abord en randonnée, puis ensuite en visite de vignoble, en terminant le mois en chalet et sur une piste de karting. J’ai vécu un anniversaire mémorable, organisé d’une main de maître et avec des amis au top. De plus, j’ai vu ma facturation s’améliorer très rapidement et donc, au dernier jour de ce mois d’octobre, ma satisfaction est complète. J’ai vécu plusieurs vies dans ce mois et je suis plutôt content du résultat. Bien sûr, j’ai aussi connu des moments plus difficiles au cours de ce nouveau mois avec des décisions difficiles à prendre. Je pense commencer cette 32ème année de mon existence en étant empli d’ambitions et de rêves que je ne soupçonnais pas jusqu’ici.
Je remercie mes proches pour l’accueil en France et mes amis pour ce retour festif au Canada. Vous êtes merveilleux !
Voici un mélange de photos résumant ce mois d’octobre :
❤️ super article mon gros
Salut ! on s’est rencontré en AirBnB il y a 3 ans chez Karine, je n’avais pas lu ton blog depuis longtemps. Bel article je me suis pas mal retrouvé aussi dans tout ce que tu as dis sur ton expérience. Bonne continuation à toi 🙂